Platane for ever

Dans le jardin, sur la pelouse devant la maison, sous nos fenêtres, se dresse un arbre immense au tronc généreux sur lequel se greffent en éventail, des branches larges et sinueuses. C’est un platane de quatre cents ans, planté au moment de la construction de ce mas provençal. Comme le veut la coutume locale.

Ce platane a décidé il y a quelques trente ans mes parents à acheter cette maison en ruine, et ses nombreux champs en perdition. Cet arbre n’est pas ordinaire, il suscite l’admiration.

Sous ce platane ombrageux, passe un peu de lumière. La lumière tendre traverse le feuillage large. L’ombre me baigne, me caresse. L’ombre se balance, vacillant au grès du vent. Mon ombre se noie dans cette ombre démesurée rien de mon corps ne se distingue.
Je sens ses racines sous mes pieds, cet ancrage solide. Cette force qu’il insuffle, le vent souffle, mais avec lui rien, aucun mistral ne peut me déloger. Sentez pourtant la puissance du vent dans sa ramure. Regardez ces branches s’agiter comme un chef d’orchestre au cent bras désarticulés.
Je lève mes yeux sur lui, lui, le témoin de mes premières années, de ces étés heureux parce qu'insouciants. 
Je m’approche de son tronc imposant, lui, le témoin de mon union avec un homme, lui, dont la bénédiction m’a été nécessaire.


Sa sève m’a nourrie, et dans son feuillage, assise sur ses larges branches, il m’a accueillie. Mes cahiers sur mes genoux, j’écrivais. Eté après été, je puisais dans sa pénombre créative mon inspiration. D’autres chantaient ses louanges à la lueur de bougies. Mon arbre. Le seul à qui j’ai juré fidélité, comme à l’écriture. Avec lui j’aiguise mon regard et ma pensée furieuse. Avec lui, je traque mille émotions. De moi, il a fait une autre. Cet espace où je me sens comprise. Le seul lieu que j’ai jamais habité.

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